Ironman XXL de Nice

Compte Rendu de Jean-Christophe:

Le soleil pointe sur la baie des Anges et au large se lève la brise de Nice, ce soir on sera tous … cassés ! 1240 inscrits, la moitié d’étrangers.

Sur la plage, pas de panneau ‘gros qui brasse’, il n’y en a pas sur les IronMan, alors je me calle sous le sas ‘1h25’, bisous JB et à ce soir. L’eau est turquoise, translucide et les rayons ricochent sur les petits galets, c’est magique. Un peu seul sur les premiers 1000 mètres, un peu brassé par la houle sur le premier travers, je trouve enfin un lièvre et ne le lâcherai plus. Il zigzague et nous ferons 4000 mètres. Lorsque son allure faiblit franchement, il est trop tard pour changer de tracteur. Ce n’est pas grave, une longue journée nous attend.

Pour les amis, nager 4 km en 1h27, c’est incroyable. Au Fontanil, ça veut dire qu’il faut construire une ligne 7 ‘escargots’ et recruter un adjoint à Joanin. Je suis content.

J’ai beaucoup bu avant de partir et j'ai oublié de faire pipi dans la mer, alors je me lâche avant de quitter la combinaison, personne n’en saura rien de toute façon. Je fais une transition très relax, je suis venu pour finir enfin mon premier Ironman complet.

Mon prédécesseur chute 10 mètres après être monté sur le vélo, je le heurte, pars en vrille, me récupère, ouf ! Après 20 km enfin un petit mur à 12 / 13%, je rejoins du monde et commence à doubler, c’est bon pour le moral. Pour éviter de m’emballer, je décide de faire la causette avec tous ceux que je dépasse, c’est très sympa.

Les étrangers de 50 pays sont ravis d’être là. Beaucoup d’italiens bien rigolos, un néozélandais bloqué à Londres depuis le Covid, un vénézuélien, un syrien fier de représenter son pays, un israélien qui rame avec sa roue pleine, un russe pas causant, un américain avec son fils, des portugais, des anglais qui ne font pas de la promenade. Deux jeunes sénégalais tout sourire, très athlétiques font leur première course, premier col de leur vie, première fois en France. Ils sont subjugués par le décor époustouflant du col de l’Ecre. La natation fut longue mais ils espèrent briller sur le marathon.

Je retrouve une fois encore Vincent qui pousse son frère Léo polyhandicapé, on bavarde un peu. Léo ne répond pas, il est sourd et muet. Trop dur pour Vincent, il abandonnera un peu plus tard. Un arbitre me dit que je parle trop, je n’ai pas le droit !!!

Passé les 2400 mètres de grimpe, après avoir doublé beaucoup de monde, je décide de passer en mode récupération pour préparer la course à pied. En plus, j’ai les jambes bien lourdes depuis plusieurs jours, sans doute raté ma fin de préparation.

Le parcours est somptueux, plateau de causses, route en balcon qui va de tunnel en tunnel, magnifiques villages accrochés aux falaises calcaires, joli ruban de bitume qui tortille.

Au ravito perso, mes gourdes sont bouillantes, heureusement j’ai de la poudre pour un plan B avec le ravitaillement des bénévoles. Je mange souvent par petites touches, ça passe bien, bananes, figues séchées, barres, sporténine, mini sandwich jambon et tomme corse de brebis, mais surtout ce qui passe le mieux ce sont les patates et j’aurai du les saler davantage, j’en enfile huit au total !

Je dépanne un concurrent en tubeless jantes larges désespéré de trouver une chambre avec longue valve, moi qui achète ça par erreur, vive les erreurs !

Je termine le vélo en 7h, je pensais qu’avec la grosse gestion ce serait même un peu plus long, donc je suis content. Sur la fin, j’ai converti une gourde en eau pure pour m’arroser car il commence à faire très chaud.

Retour sur la promenade des anglais ensoleillée. On retrouve mon ancien club MyTribe, on était vingt sur les deux courses, les coachs donnent des conseils. Christian gagnera sa place pour Hawaï. Philippe ne passera pas la barrière horaire avec une insolation car c’était chaud quand même et ses crampes seront fatales. Ceux qui ont fait le 70.3 le matin nous encouragent, Ben, Maxime, Tony, Romain Guillaume qui me dit avoir fait 20ème, Charlotte Morel, notre conseil nutrition qui à fini 9ème, Fred Belaubre mon coach qui fait des photos. Juju le maître nageur des petits Landru donne de la voix. Ils sont nombreux. C’est sympa. On croise aussi des maillots MyTribe qu’on ne connaît pas et on s’encourage.

Au bout de 7 km, une envie de faire popo me prend. Putain j’espère que je ne vais pas faire un Ronan comme on dit du côté d’Embrun. Ouf, c’était une fausse alerte, juste un gros coup de vent. Par contre en me posant sur le trône, j’ai vu la crampe qui me guettait au coin des ischios. Heureusement il ne reste que 35 km mais il va falloir gérer cela sévère. Du coup je marche 20 mètres à chaque ravitaillement et j’arrose très abondamment les jambes d’eau, tant pis pour le chrono et si je fais plotch plotch plotch en courant.

Et puis je retrouve JB qui a presque un tour d’avance sur moi. Il a l’air très bien. On s’encourage à chaque croisement. Je crois bien qu’on va le faire ! Mon ami sénégalais me rejoint mais bientôt il me lâche avec ses jambes de gazelles.

Eric sur le bord de la route fait les petits films pour les envoyer sur le groupe WhatsApp de nos 40 followers du jour, les sœurs de JB sont hystériques.

Mon troisième tour est franchement plus lent mais je sais que je finirai le deuxième marathon de ma vie, 30 ans après le premier. C’était à New-York, moi qui ne courais jamais, j’avais osé me lancer sur ce truc de ouf suite à un pari entre copains, sans entraînement, fini en près de 5 heures et juré qu’on ne m’y reprendrai jamais.

La nuit tombe et la fraîcheur l’accompagne, c’est bien. Plus besoin de s’arroser la tête, on garde l’eau pour les jambes. J’ai fini mes gourdes de transition, mes gourdes du ravitaillement perso sont une fois de plus trop chaudes.

L’estomac en a franchement marre. Alors j’improvise un cocktail Saint-Yorre et Gatorade et j’aime bien.

Sur le dernier tour je reprends un petit peu de vitesse. Je double quelques marcheurs, vomisseurs, gens à l’arrêt, et même les deux sénégalais épuisés … et sous les projecteurs, au bout de la ligne droite, après 13 heures et 23 minutes d’effort, 10 mois d'entraînement studieux, je retrouve, devinez qui, mais non, vous ne devinerez jamais … c’est JB qui est là et qui m’attend depuis une heure. Et puis c’est Delphine de MyTribe qui oublie le protocole et m’embrasse en me remettant elle-même ma médaille de finisher de l’IronMan de Nice 2021, cassé, heureux, cassé, heureux.

Epilogue. Les jambes lourdes ont tenu, j’ai évité les crampes pour finir. Je suis très heureux d’avoir su gérer la course à la hauteur de ce dont j’étais capable ce jour-là. Je suis 12ème sur 41 chez les viocs de 60-65 ans et au-delà il n’en reste qu’une poignée. Mon marathon a duré 4h39. Je termine 631ème sur 1240 au départ et 930 finishers.

Epilogue deux. On me dit à l’oreillette qu’une course par équipe m’attend à Paladru dans 10 jours. Franchement, là tout de suite, vu l’état de mes jambes et la fatigue générale, aujourd’hui c’est juste impossible à imaginer. Alors je ne sais pas, l’avenir dira.

Ce fut la course la plus dure de ma vie. Merci à toutes les salamandres qui nous ont envoyé des petits messages de soutien, c’était énorme. C’est ma première année en club et ça fait plaisir toutes ces attentions au moment de partir sur une telle aventure.


Compte Rendu de Jean-Baptiste:

Ca y est, on y est à Nice avec JC, pas de canicule, pas de pollution, on va pouvoir faire le vrai Ironman cette fois ci !

Après 10 mois de préparation, on va le faire le challenge sportif de notre vie... Nous sommes tellement heureux d’y être, prêt à en profiter à 200%, et évidemment soucieux aussi de ce qui nous attend. 1er marathon pour moi, la grande inconnue, et ma plus longue distance en CAP avait atteint les 30km, à Nice justement 2019, où je terminai avec un estomac en vrac en vomissant...

Pour le longue distance, il faut gérer. Et pour moi, c’est gérer l’euphorie, la boisson, et l’alimentation. J’espere le faire entre 13h et 14h.

J’ai mon plan : sur le vélo, je bois une gorgée toutes les 10 minutes de ma potion magique à moi car je la connais, je mange une bouchée de mes barres/patates au sel/figue/sandwich jambon-brebis corse toutes les 15 minutes, à chaque ravito je m’asperge d’eau la tête et les jambes pour faire baisser la température corporelle.

7h40, c’est parti !!

La natation se passe à merveille dans ces eaux de la Méditerranée cristallines à 24°, je pose ma nage sans problème, je ne mets que les bras et à peine les jambes. Je sors de l’eau en 1H14, je suis ravi !

Le vélo : c’est ce que je préfère, en plus on a 2400m, j’adore la grimpe. Les paysages sont magnifiques, les jambes sont là, je respecte à la lettre mon plan de nutrition et d’hydratation, je me sens bien et j’en garde sous le pied pour la CAP, je termine en 6h25, je suis heureux !

La CAP : maintenant c’est là que tout se joue. Il fait chaud, température ressentie à plus de 30°, et miracle, les jambes sont là. Je boucle les 1er 10km en 55 min, je commence à rêver du marathon en 4h et de passer sous les 12h ! T’emballes pas JB… J’avais raison, je franchi le semi à 2h00, mais je reste très satisfait.

Les jambes commencent à tirer. Et au km 22, ma potion magique ne passe plus, je vomi… Là ma crainte est qu’il reste du chemin, ça va être long sans rien pouvoir avaler quoique ce soit. Alors je pense à Greg qui m’a dit : c’est au moral le dernier semi. Je confirme. Je fais les derniers 20km en 2h30, en buvant de mini gorgées eau/coca/eau, je tiens le coup, c’est le principal

Je savoure les 2 derniers km en me remémorant toute cette préparation pendant des mois avec ses plaisirs, ses prises de tête, ses casses tête de planning familial, puis j’entends « JB, you are an Ironman », j’en ai les larmes aux yeux !

Au final je termine en 12h23, au bout de ma vie, en attendant mon JC sur la ligne d’arrivée. C’est vraiment dur, mais c’est un moment de vie et de partage juste incroyable.